APPEL À MANIFESTATIONS D’INTÉRÊT : IMAGINAIRES ET PERCEPTIONS DU FERROVIAIRE

Dans le cadre de ses réflexions sur l’avenir du système ferroviaire et des pratiques de mobilité, SNCF Innovation & Recherche souhaite, à partir de la rentrée 2017, constituer au sein du Groupe Conception et Technologies pour le Voyageur un programme de recherche multidisciplinaire appelé « Mobilités, Cognitions, Conforts ».

L’objectif premier de ce programme sera celui d’explorer, par le biais des multiples facettes des sciences s’intéressant à la dimension cognitive humaine (anthropologie, design,  neurosciences, psychologie, sémiotique, sciences du langage, etc.), le vécu des voyageurs, clients et collaborateurs du Groupe SNCF afin d’apporter un regard renouvelé sur leurs différentes interactions et promouvoir ainsi :

  • Une meilleure connaissance des changements en cours dans le domaine des mobilités ;
  • Une meilleure adaptation aux demandes et aux besoins des clients ;
  • Des pistes pour de nouveaux services, produits ou pratiques ;
  • Une productivité accrue et une amélioration des conditions de travail.

« Imaginaires et perceptions du ferroviaire » constitue un des axes fondateurs de ce programme souhaitant favoriser l’émergence de travaux permettant de mieux comprendre l’origine, les dimensions et les dynamiques de l’imaginaire culturel et des perceptions attribuées au domaine ferroviaire, et notamment au Groupe SNCF.

Il s’agira ainsi pour les candidats potentiels d’accompagner SNCF, par le biais d’un stage pouvant se prolonger par une thèse ; directement dans le cadre d’une thèse ou dans le cadre d’un travail de recherche postdoctoral, dans l’exploration de différents thèmes de recherche permettant d’enrichir les connaissances relatives aux « imaginaires et perceptions du ferroviaire » et permettre ainsi à l’entreprise de se situer et se repositionner au mieux face aux enjeux changeants des mobilités et des nouvelles mobilités.

 

Une liste non exclusive des sujets susceptibles d’être proposés et traités dans ce cadre et des disciplines permettant de les approcher pourrait comporter :

1.    ESPACES DE MOBILITÉ ET PERCEPTION DU TEMPS (approches possibles : anthropologie, neurosciences, psychologie, sémiotique)

Depuis toujours le concept de mobilité a impliqué une relation changeante entre les espaces et le temps liés au déplacement.

Cette relation est d’autant plus native pour le domaine ferroviaire que celui-ci est, d’un point de vue technique et historique, non seulement à la base d’une standardisation du temps à l’échelle tant nationale qu’internationale, mais aussi d’une accélération notable de la vitesse de déplacement que l’homme avait auparavant pu connaître. Le changement de lieu propre au déplacement, toutefois, ne peut qu’impliquer pour les voyageurs une confrontation avec le temps standardisé du système technique ferroviaire ne correspondant en aucune manière au vécu quotidien du temps cognitif avec les accélérations et ralentissements propres aux processus biologiques et aux canons sociaux structurant les pratiques de chacun.

Une fois inséré dans une situation de mobilité impliquant un temps de préparation, des parcours et des étapes intermédiaires, des changements de lieux obligatoires, des délais d’attente plus ou moins longs, des points morts, du stress ou des retards, un voyageur est alors pris dans une chaîne globale où ce temps mathématique doit être confronté à un vécu spécifique par le biais d’interactions ponctuelles et personnelles allant des expériences passées aux dimensions culturelles établies et propres à la société en passant par l’imaginaire qu’elles véhiculent.

Quelle est donc la perception du temps d’un voyageur accomplissant une trajectoire de mobilité et comment, tout au long de son parcours, son sentiment des contraintes et des possibilités lui étant offertes par l’entreprise l’accompagnant peut varier ? Comment identifier les étapes les plus saillantes, l’offre de service la plus adaptée ou l’accompagnement le plus utile pour que l’expérience de mobilité qu’il recherche soit la plus fluide, accessible et souple possible ?

Comment faire de ces lieux, et notamment des gares, des lieux de vie, réhumanisés, propices aux échanges, rencontres, activités ludiques et culturelles où le choix serait possible et non plus limité à celui de lieux de passage où l’enjeu n’est que l’accès le plus rapide à un train ou à un quai pour enchaîner les étapes techniques d’un déplacement ? Comme au Pays des merveilles, comment « dérégler le temps perçu », le suspendre pour inciter le voyageur à marquer une séparation entre réel et merveilleux, entre dedans et dehors ?

 

2.    APPROCHES COGNITIVES DES ESPACES EN GARE (approches possibles : anthropologie, architecture, design d’espace, géographie, neurosciences, psychologie, sémiotique, sciences du langage, urbanisme)

L’espace des gares est le plus souvent lu et réfléchi comme un simple espace de déplacements dont la conception et les buts premiers sont ceux d’une fonctionnalité froide adaptée aux masses des voyageurs anonymes le traversant au quotidien.

Pour tout voyageur réel, toutefois et au-delà des simplifications nécessaires aux maîtres d’ouvrages et spécialistes (exploitants, analystes des flux, architectes, etc.), ces espaces cachent une richesse et souvent des incohérences bien plus vastes que ce qu’il serait aisé d’imaginer. En effet, au-delà d’une complexification croissante due à l’augmentation de l’offre de transport, au développement des politiques d’intermodalité et à la progressive mise à profit commerciale de ces lieux du fait de leur richesse de public et du désengagement financier des pouvoirs étatiques, ces espaces ne peuvent être perçus et vécus par les voyageurs qu’à travers le prisme propre de leurs actes de mobilité.

Dans ce cadre, ces lieux et leurs aménagements, neutres en apparence, font émerger des axes clivants entre contraintes et charges liées au déplacement et l’ouverture hédoniste que celui-ci  permet par la possibilité d’échapper au quotidien. Ils peuvent donc être perçus de manière radicalement opposée par la multitude de clients, voyageurs ou habitants du quartier qu’on peut y croiser. De la même manière, ces espaces à l’évidence axées et construits autour d’un paradigme collectif, laissent ouvertes des brèches inattendues d’individualité car tout usager s’y trouvant est un piéton émergeant et construisant son identité et ses comportements en opposition à la masse des « autres » individus l’entourant.

Il sera donc question d’explorer et révéler la richesse de ces lieux de passage bien spécifiques que sont les gares prises dans leur acception contemporaine de pôles d’échange multimodaux ouverts à une multiplicité de modes de transports et d’entreprises de transport et d’en faire émerger les multiples lectures et différenciations possibles. En particulier, le travail d’enquête pourra se concentrer sur la manière dont ces espaces et leurs équipements sont lus et se différencient aux yeux de leurs habitants, rendant ainsi possible une orientation et un parcours fluide, l’émergence des caractéristiques et spécificités permettant leur identification  ou encore la reconstitution pragmatique des rapports, frontières et relations sociales.

 

3.    ESPACES DE TRANSPORT ET SENTIMENT DE SÛRETÉ (approches possibles : anthropologie, neurosciences, psychologie, sémiotique)

Un lieu de transport, affronté de manière obligatoire lors d’une transition liée à un acte de mobilité, est tout le contraire de l’espace rassurant des murs domestiques.

L’individu le traversant se trouve de manière générale dans la nécessité de s’y rendre afin d’accomplir un objectif tiers ; n’en possède le plus souvent pas une connaissance explicite et préalable et se trouve à contrer le stress de la multitude et des contraintes temporelles, normatives ainsi que celui lié aux processus de sécurisation des personnes et des systèmes d’exploitation lui étant imposées et rendant les espaces de transport paradoxalement de plus en plus hermétiques.

Il est donc aisé de comprendre à quel point ce lieu, dense de foule et de diversité peut, par les frictions qu’il ne saurait éviter de créer comme par la cassure des routines et des habitudes établies, être vécu comme une agression par l’individu et ouvrir ainsi la porte à un sentiment d’insécurité cognitif et corporel avant même d’être social.

Le sentiment de propreté peut-il par exemple influer directement sur le sentiment de sécurité ? Quels sont les schémas et les références associés à ces lieux ? Quels pourraient-être les leviers permettant d’influer directement sur l’ambiance d’une gare ?

Quel pourrait-être l’impact de l’éclairage ou des systèmes d’économie d’énergie en permettant la modulation sur la perception de la sûreté d’un couloir ou d’un souterrain ? Quels rôles peuvent jouer la consommation énergétique des installations, l’impact du bâti sur son environnement, son intégration écologique sur la perception de cet espace ?

Quelles stratégies d’aménagement des lieux constituants les pôles d’échange, si différents que pourraient être les espaces fumeurs, les salles d’attente, les accès et les quais etc., permettraient d’adapter l’offre au ressenti des utilisateurs ?

Quelles odeurs ou encore quel choix de matériaux permettraient une confrontation atténuée et adaptée au plus juste point avec la diversité des pratiques des autres voyageurs, mais également des exploitants du site ?

Il sera question, dans le cadre du travail proposé, d’enquêter et d’aider les différents spécialistes intervenant sur un choix de ces domaines à mieux comprendre les facteurs contribuant à développer ou à réduire ce sentiment d’insécurité. L’objectif sera celui d’identifier et d’objectiver les leviers permettant d’adapter au mieux l’ambiance et l’aménagement desdits lieux aux attentes et aux pratiques identifiées dans la logique générale d’une quiétude respectueuse des différences individuelles et des besoins collectifs.

 

4.    PERCEPTION DU PAYSAGE ET MOBILITÉ (approches possibles : anthropologie, géographie, neurosciences, psychologie, sémiotique)

Dès le départ, la vitesse du train a pu être mesurée par des chiffres mais peut-être encore plus par une perception nouvelle du monde défilant au-delà de la vitre et notamment, comme il était déjà possible de le lire dans le bassin d’Arcachon en 1842, par cette impression «  […] de voir fuir sous ses pas avec la rapidité d’une flèche les arbres et tous les objets qui bordent la route […] ». L’arrivée par la suite de trains à plus grande vitesse jusqu’au TGV ont mené à une contraction spatio-temporelle et, avec elle, à l’éloignement progressif du paysage perceptible pour le voyageur. Ce processus, sans oublier le succès plus récent des trains touristiques sillonnant à plus douce vitesse des paysages riches en histoire, nous invite à nous interroger sur les spécificités et les effets de la perception du paysage liés au mode ferré et à ses différentes distances et vitesses d’exploitation.

Pouvons-nous considérer que la perception du paysage d’un voyageur en train est différente de celle d’un conducteur ou passager d’automobile, d’un voyageur du transport aérien ou même, demain, de celle qui sera propre aux premiers utilisateurs d’Hyperloop ? Quelles sont ses spécificités, ses patterns visuels ainsi que les effets qu’elle peut engendrer sur les voyageurs et sur leurs activités ? Une meilleure connaissance de ce ressenti et des effets qu’il pourrait induire, pourrait-elle induire des agencements intérieurs spécifiques ou des solutions techniques plus adaptées capables de mieux répondre aux besoins de ces voyageurs dans la variabilité de leurs pratiques? Quels sont les nouveaux services ou les nouvelles couches technologiques qui pourraient être intégrés et proposés en accord et en lien avec cette perception spécifique ?

Si des pays différents de la France ont de longue date apporté des réponses très spécifiques à la question de l’agencement intérieur du matériel de transport, du tout capacitif du système français aux choix bien plus libéraux des pays à grandes surfaces comme les États-Unis, l’Inde ou la Russie, il nous semble ainsi intéressant de nos jours de questionner à nouveau ce sujet en l’abordant par la dimension perceptive, par l’interprétation et par les effets induits par ailleurs toujours présent dans le train et par les effets que celui-ci peut impliquer sur les différentes typologies de voyageurs.

 

ENCADREMENT

Académique : À définir selon profil

Entreprise : SNCF – Innovation et Recherche / Groupe Conception & Technologies pour le Voyageur

 

CRITÈRES DE RECRUTEMENT

– Intérêt et proximité de la proposition par rapport aux axes décrits ;

– Sélection sur dossier et entretien ;

– Qualité, selon profil, de l’intégration et de l’expérience dans le domaine académique et de la recherche.

 

LIEU

– SNCF,  Direction Innovation et Recherche et laboratoire de recherche partenaire ;

– Déplacements à prévoir en France.

 

STATUT

Stagiaire, doctorant ou post-doctorant.

 

QUALITÉS REQUISES

– Curiosité intellectuelle ;

– Rigueur méthodologique ;

– Capacité à conceptualiser, à rédiger un état de l’art et à développer des protocoles d’investigation en situation réelle de travail et de formation professionnelle ;

– Goût pour la pluridisciplinarité et le travail de groupe ;

– Volonté de construction des liens forts entre le monde académique et celui de l’entreprise.

 

LIVRABLES

– Livrables en lien avec l’avancée du projet qui sera défini et co-construit entre le laboratoire de recherche, SNCF – Innovation & Recherche et les autres Branches et Directions SNCF concernées ;

– Communications dans des congrès et articles dans des revues scientifiques ;

– Thèse de doctorat, mémoire de recherche, publications.

 

INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Par mail : simone.morgagni (@) sncf.fr

 

ENVOI DES CANDIDATURES

Curriculum Vitae, relevés de notes de M1, de M2 ou projet de recherche doctoral ou postdoctoral, lettre de motivation, et éventuelles publications précédentes uniquement par voie électronique à : simone.morgagni (@) sncf.fr

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